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EXCLU : MATHIEU VIGIER (FREESTYLER)

Le Freestyle est une discipline artistique et sportive libre mêlant l’acrobatie, la jonglerie, la danse et la gymnastique. L’accessoire principal est un ballon de football, bien qu’il existe des ballons de Freestyle adaptés. Chacun son ballon, chacun son style. Billion Keys est allé à la rencontre de Mathieu Vigier, jeune prodige de 18 ans, qui a pour but de participer aux championnats du monde de cette discipline. Freestylement vôtre.

Par Rédaction 12 juin 2021

Mathieu, peux-tu te présenter au grand public ?

Je m’appelle Mathieu Vigier, 18 ans, Freestyler football depuis plus de quatre ans. Cette discipline est l’une des nombreuses variantes du football. Je l’ai découverte lorsque je jouais au sein d’un club de football au Gabon (ndlr : mutation professionnelle de ses parents). Je me suis renseigné sur cette discipline en regardant des vidéos sur internet et ça m’a beaucoup plu.

En rentrant en France, j’ai signé au club de Puteaux. C’est vraiment là où j’ai commencé à me perfectionner. J’ai dû arrêter le football en club pour me consacrer pleinement à cette discipline. Je n’appartiens à aucun collectif.

Freestyler cela ne s’invente pas ! Quel fut le réel déclic ?

Quand je jouais au football, j’ai toujours aimé tenter des gestes techniques. Je jouais latéral gauche et milieu gauche. J’essayais de reproduire sur le terrain tous les gestes que je pouvais voir sur internet lorsque j’avais 14 ans, notamment ceux de Lionel Messi. Au fil du temps, j’ai découvert que de nombreux jeunes pratiquaient le Freestyle.

Ma bonne maîtrise de jongles m’a poussé à m’y intéresser davantage. J’ai remporté plusieurs compétitions de jonglages qui étaient souvent organisées en parallèle des tournois d’équipes. La jonglerie m’a toujours plu. Quand on sait jongler, on peut en faire 100, 200, 300…

Mais à un moment donné, je voulais tenter des choses plus compliquées. Je me suis donc entraîné seul dans mon jardin avec mon ballon. C’était très dur de reproduire les gestes visionnés sur internet. Je ne progressais pas très vite, mais j’étais très motivé à l’idée d’y arriver !

Comment est rythmé ton emploi du temps ?

Je continue toujours les cours en parallèle, car il est très difficile d’en vivre. Je peux m’entraîner seul ou bien en groupe. Il existe une communauté française de Freestyle football. J’ai demandé s’il existait des regroupements pour s’entraîner. J’ai ainsi pu progresser au contact des autres Freestylers. C’était bizarre au tout début de me retrouver avec des « vrais » Freestylers.

Quels sont les principaux évènements auxquels tu as participé ?

Il y a plein d’évènements organisés, notamment des tournois nationaux et internationaux. J’ai fait mon premier Top 16 lors des championnats de France 2018 (ndlr : classé entre la 9e et 16e place) à Clichy, organisés par Red Bull Street Style et le groupe Urban Ball dirigé par Sean Garnier (ndlr : champion du Monde en 2008). J’ai également participé au Championnat de France en 2019 et à la Coupe de France en 2020 (ndlr : Top 22). Le Covid-19 a ensuite stoppé certains rassemblements.

Les déplacements sont-ils à ta charge ?

La plupart des grands évènements se déroulent à Paris, ce qui m’arrange bien évidemment ! Lorsque c’est en Province, c’est effectivement à ma charge. Par exemple, je suis allé à Bordeaux, Lorient et Le Mans en 2019.

Quelles sont tes ambitions ?

Je n’ai pas vraiment un but ultime, mais j’avance en voulant progresser et prendre du plaisir. Je m’entraîne toujours, même si cette année n’a pas été évidente, car je suis en études supérieures. Même s’il n’y a pas d’évènement actuellement, il faut toujours garder la motivation pour progresser.

J’espère quand même participer aux Championnats du Monde. Les prochains ont lieu en août à Prague, ouverts à tous (ndlr : Super Ball). Pour cette année, ce ne sera pas possible pour moi. Par contre, je vais tout faire pour m’y rendre l’année prochaine.

Quels sont tes points forts ?

Chaque Freestyler possède son style. Certains sont plus acrobatiques, d’autres plus techniques ou bien plus créatifs. J’essaye de faire un peu de tout ! J’aime bien faire du « Lower », comme par exemple le tour du monde ou double tour du monde (ndlr : ATW = Around The World), changement de jambe… Les gestes techniques sont pour la plupart dénommés en anglais.

Faut-il un matériel particulier pour pratiquer ce sport ?

Au début, la qualité du matériel n’est franchement pas primordiale. Souvent, les jeunes veulent tout de suite les meilleurs ballons, les meilleures chaussures… Mais même les meilleurs ont commencé avec de simples baskets et un vieux ballon !

Quand on commence à réellement avoir un bon niveau, il y a effectivement des chaussures de Freestyle adaptées. Elles sont très légères pour faciliter les figures exécutées. Il y a aussi des ballons en caoutchouc, notamment de la marque Urban Ball, qui sont vraiment tops. Ils permettent une accroche spécifique pour certains mouvements. Il existe aussi des ballons de foot officiels (ndlr : match ball) qui coûtent un peu plus cher, mais qui durent plus longtemps. Le choix du matériel va vraiment dépendre des figures tentées.

Comment gères-tu la pression avant une compétition ?

Ce n’est jamais facile d’arriver seul avec son ballon, au beau milieu de personnes inconnues. Lorsque j’ai participé à mes premiers championnats de France en 2019, je me suis retrouvé dans un groupe de qualification parmi de très bons Freestylers. Forcément, ça génère du stress ! De plus, nous n’étions que deux joueurs à pouvoir nous qualifier pour le prochain tour parmi huit prétendants.

Avant les battles (ndlr : affrontements), je répétais mes gestes et je m’hydratais régulièrement. Il m’arrive parfois de faire un petit tour sur les réseaux sociaux pour me libérer l’esprit. L’essentiel est d’être prêt mentalement au moment opportun. Il ne faut pas manquer des figures en live, sinon on peut très vite se décourager. Chacun fait avec ses armes et ses tricks (ndlr : figures).

Faut-il être un bon footballeur pour être un bon Freestyler ?

Non, pas du tout ! Inversement également… Ça n’a rien à voir. Je connais beaucoup de bons Freestylers qui ne savent pas faire une belle passe ou un beau tir. Ce sont deux disciplines très différentes, même s’il y a un ballon et certains mouvements identiques. La grosse différence réside dans le fait que le Freestyle est un sport individuel, la très grande majorité du temps.

Certes, un joueur comme Paul Pogba arrive à faire un double tour du monde en l’espace de quelques minutes, alors que beaucoup de Freestylers n’y arrivent même pas, mais tout dépend de la technique individuelle.

Quel serait ton Top 5 des footballeurs qui feraient de très bons Freestylers ?

Celui qui a le plus mis en valeur cette discipline, c’est incontestablement Ronaldinho. Les publicités avec Nike ont grandement mis en avant le Freestyle. Tout est parti de là ! Ronaldinho, c’est le Brésil, très technique, tout le monde l’aimait. J’ai regardé de nombreuses vidéos de ses gestes techniques. En second, je mettrais Maradona. Il a une aisance technique incroyable. Certains de ses mouvements ont inspiré beaucoup de Freestylers. Ensuite, je complète le podium avec Pogba, Cristiano Ronaldo et Neymar.

Comment gères-tu la concurrence ?

Il y a beaucoup de concurrence, mais toujours avec respect. Certains veulent battre celui-ci ou celui-là, car ils sont réputés, mais il n’y a jamais eu de méchanceté. Il existe parfois des petites embrouilles, mais ça s’estompe très rapidement. À chaque meeting, tout le monde se serre la main. C’est une concurrence saine.

Quels sont tes axes d’amélioration ?

On peut toujours progresser ! Tant que le Freestyle existera, il y aura toujours des gestes à inventer. C’est surtout dans la création de gestes que j’essaye de m’améliorer le plus. Je tente régulièrement de nouvelles combinaisons. L’essentiel est d’entretenir le plaisir.

Imagines-tu ta vie sans ballon ?

On dort avec, on se douche avec ! (rires). Non, je ne peux pas l’imaginer sans. Même sans découvrir le Freestyle, je jouerais au football jusqu’à ce que je ne puisse plus le faire. Je supporte le PSG depuis tout petit, je regarde tous les matchs. J’aime trop le football pour me passer du ballon. Si l’on m’envoie sur une île déserte avec un ballon, ça m’ira !

Quelles sont les clés de la réussite pour un être un bon Freestyler ?

La passion ! Sinon, on peut très vite se décourager. Dans le Freestyle, il y a énormément de gestes techniques. Lors de certains entraînements, on est parfois moins bien, il faut donc beaucoup de détermination. Il faut de la rigueur, car s’entraîner une seule fois par mois ne sert à rien. Tout comme vouloir trop en faire ne sert à rien. Il faut adopter un rythme régulier d’entraînement.


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