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Helder Esteves (US Saint-Maur Lusitanos/N3) : “Le plus gros piège est de vouloir aller trop vite !”

Interview exclusive 100% BK d’Helder Esteves, coach de l’US Saint-Maur Lusitanos (N3), qui a pris les commandes de l’équipe fanion en novembre dernier. Pour Billion Keys, le technicien nous dévoile la place offerte aux jeunes dans le projet du club francilien et donne de précieux conseils aux talents de demain.

Par Rédaction 30 janvier 2024

▶️ Actuellement 4e de votre championnat (groupe H), vous réalisez une bonne saison après avoir connu la rétrogradation l’an dernier. Quels sont les raisons de ce regain de ‘forme’ ? Quasi intraitable à domicile, est-ce une des clés de votre réussite ? 

“Etant donné que j’ai repris l’équipe le 22 novembre dernier, je ne porterai pas de jugement sur le travail réalisé par mon prédécesseur. Des erreurs ont peut être été commises, des mauvais choix également que j’aurais peut-être pris aussi. Il ne faut donc pas vivre avec le passé et avancer. Depuis ma prise de fonction, nous avons remporté 4 matches sur les 6 disputés (4V-1N-1D). Je ne sais pas si on peut parler d’un regain de forme, toujours est il que l’équipe peut être véritablement compétitive en N3. Nous avons encore beaucoup de choses à prouver d’ici la fin du championnat.”

“Après un état des lieux rapide, il a fallu donner une direction à suivre en se basant sur des choses simples. Petit à petit, j’ai mis en place un projet technique pour orienter les joueurs. Il a fallu ramener de la rigueur à tout niveau, sur comme en dehors du terrain, et surtout de l’efficacité sur le terrain tant défensivement qu’offensivement. Notre plus grande réussite à domicile qu’à l’extérieur décrit une certaine fragilité mentale au sein du groupe. Certes parfois les terrains ne sont pas au top du top, mais lors de notre revers (1-0) à Neuilly-sur-Marne le terrain n’était pas de mauvaise qualité. C’est plus un aspect psychologique sur lequel il faut travailler.”

▶️ 6 jeunes U21 sont apparus cette saison sous votre coupe. Quelle place occupent les jeunes dans le projet du club ? Les jeunes Franciliens sont ils plus talentueux qu’en Province ? Jarod Baltazar est très suivi, normal ? 

“Un club comme St-Maur n’a pas les moyens financiers de recruter hors Ile-de-France ou alors de manière chirurgicale avec un profil bien ciblé. On ne peut pas faire n’importe quoi, d’où l’intérêt de nous appuyer sur les gamins du club. Certains U21 sont issus de nos équipes de jeunes et d’autres peuvent venir des autres clubs franciliens. Force est de constater que le plus gros vivier de joueurs talentueux est à côté de chez nous, autant puiser dans ce centre de formation à ciel ouvert ! Jouer en N3 n’est pas déshonorant, au contraire les jeunes doivent se dire que s’ils sont performants à ce niveau ils attireront forcément le regard des clubs professionnels. Il est préférable de renforcer leurs qualités en obtenant davantage de temps de jeu à ce niveau plutôt que de vouloir aller trop vite.”

Arquivo de Mapril Batista - LusoJornal

“Jarod Baltazar (13 matches, 4 buts) possède de bonnes qualités au même titre que les autres U21. St-Maur doit servir de support pour leur progression. Nous avons la chance de pouvoir nous entraîner en journée, d’avoir du matériel de qualité et une ambiance de travail agréable. Il est normal d’être observé par des recruteurs, mais avant d’opter pour un projet il faut bien peser le pour et le contre. Il y a de moins de moins de mutations, de contrats fédéraux. L’herbe n’est pas toujours plus verte ailleurs. Le but n’est pas non plus d’empêcher les jeunes de rêver. Si c’est pour intégrer un club pro, pourquoi pas ! Mais il faut que cela soit donnant donnant avec le club amateur. L’objectif est de trouver un intérêt commun car les joueurs ne sont que de passage. Le football est ainsi fait. Parfois, c’est même le club qui avance plus vite que le joueur.”

▶️ Quel regard portez vous sur les jeunes footballeurs d’aujourd’hui ? Vos conseils pour ceux qui espèrent réussir une belle carrière ? Les pièges à éviter ? Profils qui plaisent quand vous êtes amenés à recruter un jeune ?

“Quand j’étais jeune, on entendait déjà les anciens dire que c’était mieux avant et que les jeunes de leur époque n’étaient pas les mêmes ! Ce discours sera valable encore dans 20 ans ! Les mentalités évoluent, c’est le monde qui veut ça. Les footballeurs restent les mêmes, ce sont juste leurs codes qui changent d’une génération à l’autre. A nous de nous adapter à ce qu’ils sont. Par contre, ceux qui réussissent sont en général des vrais amoureux de leur sport. Ils donnent de leur temps, apprennent et transmettent des valeurs, veulent progresser et gagner chaque match. Ceux qui stagnent sont plutôt des amoureux du contexte de ce sport. Ils sont à fond dans les jeux vidéos, n’ont pas une bonne hygiène de vie, privilégient l’argent, aiment se montrer sur les réseaux sociaux…”

Helder Esteves (Créteil) : « Le jeu et la performance sont la base du projet"

“Comme évoqué précédemment, le plus gros piège est de vouloir aller trop vite. Il faut également qu’ils sachent être objectif sur leurs performances et envers eux-mêmes. Il faut bien évidemment être performant de manière régulière pour se donner les moyens d’aller plus haut. Un bon joueur n’est pas celui qui fait une première entrée en jeu, qui joue un premier match titulaire ou qui marque un premier but. Cristiano Ronaldo et Lionel Messi sont les meilleurs exemples de longévité en terme de qualité et de durée. Et puis il faut faire très attention à tous ces vendeurs de rêves qui gravitent autour des pelouses. Un fléau qui ne cesse de s’accroître d’année en année.”

“Le jeune joueur qui va m’intéresser, c’est celui qui a une bonne technicité et une bonne compréhension du jeu. Il doit amener un juste équilibre au sein du groupe. Je ne m’arrête jamais sur des critères purement physiques. Ce n’est pas la taille qui fait le bon joueur ! J’ai vraiment un regard objectif sur les qualités du joueur. Je m’appuie sur des critères simples qui font l’essence même du football.”

Propos recueillis par Anthony V. pour Billion Keys.